Ce garçon s’est rapidement fait remarquer à son arrivé dans l’établissement. Mais je ne m’occupais pas encore de lui. J’en entendais simplement parler. Assez pour me demander comment ça allais se passer quand je l’aurais dans mes élèves.
Puis ce moment est arrivé. Comme chaque élève, j’essaye de lui donner ses chances (oui je laisse plusieurs chances, ça reste des enfants...). Comme chaque élève, il ne sait pas que j’ai tout ça en tête, pourtant, je l’observe.

Parfois, ils arrivent seuls à prendre une autre direction, sans l’aide d’un adulte : nouvelle année, nouveaux camarades, nouveaux professeurs… Mais parfois, le problème n’est pas l’école. Il est bien plus complexe que ça. ll est ancien et profond. Mais encore faut-il le savoir.

Je suis dans une situation où dès le début, on ne m’a pas tout dit, alors comment aider correctement ce garçon ? Ce n’est pas grave, je dois quand même avancer si je veux l’aider. "Les autres" ne doivent pas être une excuse pour le laisser couler.

Et j’ai essayé de l’aider à trouver le bon chemin, à trouver sa place à l’école, à laisser ses soucis au pas de la porte… J’ai essayé bien au-delà de ce que je m’accorde d’habitude par manque de temps. J’ai essayé de trouver des pistes pour l’amener sur le chemin, pour lui faire croire qu’il pourrait y arriver. Mais je crois que j’ai échoué, sans pour autant que ça soit entièrement ma faute. Enfin ça, c’est ce dont je me persuade.

Après ces différentes étapes, il a recommencé à faire parler de lui, à faire de mauvaises choses et pire, à mettre en danger la sécurité des autres. Ca je ne l’accepte pas. Il va donc falloir l’aider autrement.

Il faut rester lucide, on n’arrive pas toujours à aider l’autre. Parfois, il faut passer le relais car la structure dans laquelle on est n’est pas forcément la meilleure pour tel ou tel élève.

Puis arrive une dernière question, dont la réponse est trop souvent introuvable : l’amener ailleurs va l’aider ou l’enfoncer encore plus ?

Ce que l’on demande principalement et je dirais même essentiellement aux parents, c’est d’être en cohérence avec l’école afin que leur enfant ait un seul et même discours. Et c’est loin d’être gagné, ce qui provoque des situations complexes et parfois ingérable.

En effet, on peut partir du principe que les parents inscrivent leurs enfants dans une école dont ils soutiennent l’esprit, le projet, etc. Certes, ce n’est pas toujours le cas, parfois, ils n’ont pas le choix et mette leur enfant là où ils peuvent. Mais dans certaines écoles, c’est un choix qui est fait. Les parents acceptent donc des idées, des règles et tout ce qui va avec avant d’y mettre un pied. Et parfois ce sont les premiers à se plaindre quand ils ne sont pas d’accord !

Ne pas être d’accord, c’est bien sur un droit que l’on ne doit pas enfouir au fond de ça. Il ne faut pas toujours tout accepter et systématiquement faire confiance (notion que j’essaye de partager avec mes élèves). Parfois, il faut aller un peu plus loin. Mais pour retranscrire cette idée sur l’école, des parents qui ne sont pas d’accord avec un professeur, un éducateur, c’est possible, mais ça se discute entre adultes. Je lutte littéralement contre ces familles qui clament haut et fort à leur enfant que l’école a eu tort et qu’ils vont téléphoner pour se plaindre. Un enfant qui est en train de se construire va croire que ses parents vont le couvrir quand ça n’ira pas (sanction, avertissement...) et croire sa propre version de l’histoire (trop souvent arrangée). Vous recevez ensuite un appel fort agréable où le père/la mère vous explique que vous n’avez pas compris son enfant, que c’est toujours lui qui prend, que vous ne faites pas correctement votre travail, que l’autre doit aussi être punis, etc. ! C’est insupportable…

Chers parents, vous n’êtes pas à l’école. Vous ne connaissez pas le fonctionnement d’une école, vous ne savez pas toute l’histoire qui concernant votre enfant, vous ne vous doutez pas toujours du comportement que peut avoir votre enfant à l’école et qui est très différent de la maison. Nous ne sommes pas parfait, mais si vous avez un problème, téléphonez-nous, rencontrez-nous, nous discuterons entre adultes de la situation puis nous verrons ensuite comment agir, ensemble. Parfois, et je suis le premier à le dire, les enfants ont raison et subissent les foudres d’un professeur qui s’énerve sans raison et punis donc sans raison (je déteste punir injustement alors j’essaye de trouver une solution qui convient à tous). Mais l’erreur est humaine et l’injustifice fait malgré tout parti de l’apprentissage, ça j’en suis convaincu. Même si avant je pensais qu’il fallait à la vie à la mort l’éviter, je comprends aujourd’hui qu’il faut apprendre aux jeunes à s’y préparer car on peut le vivre un jour… (mais autant l’éviter, nous sommes d’accord).

Je me souviens de cas où des parents m’ont téléphoné en m’accusant d’avoir dit des choses sur leur enfant, leur famille, etc. Des choses qui n’étaient jamais sortie de ma bouche. Vous imaginez ce que ça fait ? Des parents qui appellent pour accuser simplement parce que leur enfant leur à dit que... ! A ce moment-là, les parents peuvent croire n’importe quoi ! C’est un peu simple ce que je vais dire, mais trop souvent, ce sont les parents perdus qui font ça et qui galère pour élever leurs enfants. Mais au lieu de se l’avouer d’une part, et de l’avouer à l’école qui pourra les aider, ils tombes dans les pièges connus.

La cohérence est donc primordiale pour la bonne évolution de nos petites têtes blondes. Les parents ont la plus grande place dans l’éducation des enfants mais l’école fait également une bonne partie et marque les esprits. Si les deux parties vont dans le même sens, on réussit déjà quelque chose d’important et de grand.

Chacun raconte la destination des vacances, avec des étincelles dans les yeux.

Tout le monde est finalement heureux. Une seule journée les sépare des vacances donc tout va forcément bien aujourd’hui.

Ce qui compte toujours beaucoup, c’est les différentes petites attentions qu’ils nous apportent. Pas forcément les cadeaux. Ça fait certes plaisir mais tout le monde n’a pas les mêmes moyens. Mais les petits mots de bonnes vacances, les sourires…

Dans deux semaines, je vais les retrouver, différents.
Quelque part, je suis déjà impatient. Et c’est une chance. Pour moi, mais certainement pour eux aussi.

Mon expérience me prouve qu’il n’est pas bon d’aller au delà de 7 semaines. Les élèves et les enseignants fatiguent après et ne sont aussi efficaces. Les élèves font des bêtises et sont de plus en plus absents. Les enseignants et les différents éducateurs ont moins de patiente, sont moins flexible…

Les élèves aiment généralement beaucoup ces deux derniers jours dans les "petites classes". Ils travaillent moins, regardent des films, font des goûters… C’est vraiment sympa. J’adorais ces moments-là quand j’avais leur âge.

Je n’aime pas toujours quitter mes élèves. S’occuper deux, avec tout ce que ça comprend, c’est un long travail qui demande un suivi plutôt méticuleux. Quand je les laisse partir, je ne sais jamais comment je vais les retrouver :)
Puis, ce sont toujours de bons moments à partager avec eux au quotidien. Alors forcément, pendant deux semaines, il y a un vide.

En revanche, le retour est toujours génial. Mes jours préférés de l’année sont certainements ceux des rentrées. Les retrouvailles (ici et ailleurs d’ailleurs). Pleins d’images et de souvenirs en tête, certains prennent plaisir à se retrouver, se raconter ses vacances, commencer comme une nouvelle aventure.
C’est aussi à ces moments là qu’on voit nos élèves changer et grandir. Dans tous les sens du terme.

Vendredi, chacun (ou la plupart) va/vont se retrouver sa famille, se faire, je l’espère, offrir de beaux cadeaux, être avec les gens qu’il aime et faire une pause dans ce rythme de fou qu’est celui d’un enfant.

Cette journée a toujours été noire pour moi lorsque j’étais petit. Je passais du bon temps chez moi à faire des choses qui m’intéressent. Alors l’idée de reprendre le chemin de l’école le lundi matin, c’était dur ! Chaque dimanche était un clavaire, sauf quand le soir arrivait, allez savoir pourquoi…

J’essaye de me mettre à la place des élèves. Comment enlever cette boule au ventre du dimanche ? Comment diminuer cette petite dépression à l’idée de recommencer une semaine ? Je sais qu’elle ne touche pas que les enfants ; un grand nombre d’adulte est certainement concerné par ce sentiment.

Je pense que l’idéal, simplement, est d’aimer l’endroit où l’on se rend le lundi matin, un peu endormi et la tête encore en week-end. Si chaque personne est content, pour des raisons qui lui sont propres, d’aller là où il va, ça change certainement les choses.

A nous, adultes, de rendre notre école un lieu agréable où il fait bon vivre, où les élèves se sentent en confiance, où il se passe toujours des choses intéressantes voire captivantes.

Mais comment ? L’école n’est pas composée que d’une personne. Tout le monde a un comportement différent. Les enfants sont confrontés à des situations bien différentes. Un discour par une personne. Le contraire le lendemain par une autre personne… Mais surtout, les attitudes sont différents. Il y a les gentilles...et les autres.

C’est donc un combat quotidien : rendre son école agréable...et la garder agréable.

Pour que chaque dimanche soir, l’élève, dans son monde soit un minimum heureux de reprendre l’école le lendemain pour une semaine.